L'enragé'

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Fil des billets

jeudi 15 mars 2012

Cornet de glace

Il m'est arrivé une chose extraordinaire : j'ai mangé une glace dans la rue. Oui ! J'ai mangé une glace dans la rue ! Comme quoi les événements les plus merveilleux peuvent se produire à l'improviste. Sortir et m'amuser le jour de la fête de la musique, ou même manger des glaces en me fichant éperdument que ça m'ait valu un jour de découvrir ce que toute une ville pensait de moi.

Je le clame : oui, j'ai été violée et je m'en suis parfaitement remise. Oui, j'ai été jugée pour ces viols, j'ai été cataloguée comme « salope » et les gens ont essayé de m'étouffer sous l'opprobre. Ça m'a pris plus de temps -quinze ans, une paille- mais finalement je m'en suis remise aussi. Alors youpiii !

Et maintenant que j'ai mangé une glace dans la rue en pleurant, en hurlant de joie, maintenant que je sais que je pourrai manger autant de glaces que je voudrai et qu'elles seront bonnes, sans blague ! qu'elles n'auront plus jamais ce goût de plâtre, eh bien je me sens invulnérable, comme Superman : qui pourrait bien arriver à me faire vraiment du mal ?

En plus, je suis à Berlin. Outre qu'il s'y produit tellement de soirées queer que je ne sais plus où donner de la tête, les trottoirs de la ville sont une brocante permanente et gratuite. En quelques jours, j'ai trouvé dans la rue une chouette veste pour remplacer l'ancienne qui était foutue, et deux matelas : un pour chez moi et un que j'ai échangé contre un téléphone. Comme si les objets poussaient entre les pavés dès que j'en ai besoin.

Simultanément et sans doute sous l'influence magique que je sens ici, j'ai accumulé les succès les plus improbables, de « me faire relâcher spontanément par des contrôleurs securitas » (réputés les plus intraitables) à « avoir fini d'écrire un livre » en passant par tout plein d'audaces sexuelles que je ne détaillerai pas ici. Bref, la vie me sourit à la mesure de la confiance que je lui accorde.

Pour le coup, je commence à toucher du doigt une sorte de paix, à me débarrasser de ce « ça pourrait toujours être mieux » qui me hante et m'empêche de profiter de l'instant. Ma vie ne serait-elle pas exactement ce que je pourrais rêver de mieux ? Il me semble que si. Ne serais-je pas exactement la personne qu'il faut pour vivre cette vie ? Eh, whaouh ! Il me semble vraiment que si ! T'as raison, Amanda. T'as mille fois raison.

mardi 18 octobre 2011

J'ai rêvé que je faisais une nuit blanche

Mon inconscient a un sens de l'humour qui n'appartient qu'à lui...

samedi 1 octobre 2011

Une soirée BD

Mon jeune voisin Basile se débrouille de mieux en mieux en dessin. Son style favori est le manga, mais il touche aussi à la peinture, au collage... Ce soir, il nous a proposé de jouer avec lui à faire des planches de BD selon un principe proche du cadavre exquis : chacun' dessine une case sur sa planche, puis la passe à saon voisin'.
En se donnant dix minutes pour chaque case, on a tout juste le temps de trouver une suite aux cases déjà dessinées et de l'esquisser. C'est un peu frustrant de ne pas pouvoir la colorier tranquillement, mais cela prend déjà une bonne heure de cette façon...

Voici la planche dont Basile a fait la première case :
(désolé' pour la qualité de l'image, il faut que je cherche un format plus performant)
60mn-BAG-light

Celle que j'ai commencée :
60mn-AGB-light

Et celle entamée par Gabriel :
60mn-GBA-light

mardi 9 août 2011

Nuage magique !

Alors ça y est, c'est décidé : je pars. Où ? Mais comment ça, "Où ?", pourquoi où ? Partir, ce n'est pas qu'aller... Bref. Je voulais garder ce genre de considérations pour mon nouveau blog, celui que j'ai créé exprès pour mieux vous conter mes pérégrinations. Et ce, dès maintenant, trois mois avant de quitter réellement Besançon. Décidément, je n'ai peur de rien ; puisqu'on me le dit (et je ne nierai pas que ça m'enchante de l'entendre).

A la réflexion, il est peut-être encore un peu tôt pour ce second blog. Ne vous étonnez pas si il reste peu actif ces trois prochains mois ; par contre j'ai encore des choses à dire, que je préfère dire ici (comme le billet ci-dessus à propos d'expression de genre).

dimanche 3 octobre 2010

L'âge du capitaine

Je fume la pipe. Comme bateau, étant la crédulité même j'ai tous ceux que vous voudrez me monter.
Le début de l'énoncé s'est perdu, remplacé par un plus qu'apocryphe ne laissant qu'une question certaine : Quel est l'âge du capitaine ?
Premier indice : ça fait douze ans que j'en ai trente.
Second indice : j'en ai toujours dix-sept.
Remarque : c'est pas sérieux.

mercredi 21 juillet 2010

Vorsicht Stufe

De retour de Berlin, où j'ai appris à dire "attention à la marche" et "étoile filante". Vocabulaire peu utile au quotidien, mais c'est comme trouver des cailloux bizarres : je les garde, sans vraiment faire de collection.

J'y ai fait plusieurs séjours très différents : d'abord tourisme en famille la journée, et le soir, tous les lieux où bière et maté coulent à flots. Quelques photos :

Une andouille et son fils, arrivés à minuit à la mauvaise adresse avec un mauvais numéro de téléphone, traînant sous une pluie d'orage un sac de voyage contenant la bibliothèque d'été de la plus jeune andouille, se font tirer dessus au pistolet à eau. Lenhart recueille ses victimes et leur prépare une tisane d'une grande beauté.

Au VoCu (prononcez focou ; cuisine populaire, un lieu de convivialité anarchiste), un grand type amical et froid (combinaison quelque peu déstabilisante) me propose de modeler des objets en grillage. Je fais un avion en papier qui ne volera jamais.

Une danseuse nous invite à filer avec elle à un concert punk après son spectacle. En fin de concert, on reprend tous en choeur un slove dégoulinant de miel second degré à propos de ce monde tellement gentil, en se tenant par les épaules avec des yeux roses en forme de coeurs. Quoi too much ?

C'est la nuit, nous marchons dans cette ville au calme irréel. L'horizon est traversé de cyclistes silencieux. Schnee Suppe, Sternschnuppe.

Parking de vélos. Dix fois plus de vélos que je n'en avais vu dans toute ma vie.

Je fume des cigarettes "Cabinet".

Micro ouvert féministe. Lectures de grande qualité, je ne comprends pas tout mais quelque chose passe, c'est fort. Incapable d'applaudir, j'ai l'impression que tout le monde le remarque. Qu'il est pénible d'être parano. Ensuite, bonds enthousiastes autour de Karin, innombrables projets d'écriture. Retour en porte-bagage, ma première chevauchée depuis la fois où j'ai cabossé une voiture avec ma tête. Même pas peur.

Le doux Valentin va être expulsé, il donne son frigo. "Je croyais que tu le prenais demain." Il le vide devant nous, s'excuse de ne pas l'avoir lavé alors qu'il est tout propre, nous propose de prendre aussi les épinards congelés. Nous emportons l'engin. Le lendemain, Valentin mange des épinards.

Un soir, la langue nous a manqué pour nous protéger. Deux filles qui ne répondent pas quand on les insulte, une aubaine pour les lamentables machos ordinaires que nous avons croisé. On a eu de la chance, puisqu'on s'en est tiré's "seulement" avec une belle entaille au doigt de ma copine. C'est là qu'a commencé mon troisième séjour : j'ai visité les urgences berlinoises, le commissariat berlinois, la peur de sortir seul' dans les rues berlinoises.

Il m'a fallu deux jours pour m'aventurer seul' dehors. Trois cents mètres, de jour. Ce soir, deux semaines plus tard à Besançon, j'ai senti que ce n'était pas terminé. Les femmes doivent sans cesse défendre leur droit à fouler le territoire mâle, le monde extérieur. Je n'avais pas peur et je ne vais pas me laisser intimider comme ça. Le premier obstacle, ce n'est pas ce qu'on risque en sortant, c'est d'éviter de le faire. Alors je vais sortir, exprès, faire un tour tous les soirs. Une ronde obstinée.

mardi 1 juin 2010

Les vacances de Chèvre chanceuse

Enfin fini, ce projet, enfin les vacances !
Cet après-midi, il faisait beau ; les fleurs des acacias de la BU, que je guettais chaque jour au passage, étaient encore fraîches. J'en ai cueilli autant que je pouvais, car j'avais invité un grand nombre indéterminé de gens à fêter l'arrivée des vacances et à goûter aux beignets prémédités.
Pour faire bonne mesure, j'y ai ajouté quelques fleurs de sureau sur le chemin, et des bananes et des aubergines pour faire d'autres beignets, et du cidre et de la glace pour alléger l'ensemble. Harttu a été très amusé que je commente le fait que les glaces choisies soient toutes jaunes en marmonnant quelque chose comme sacrifions la dimension esthétique.

Aloïs a pensé au sucre glace et nous avons préparé une grande quantité de pâte à beignets comme si nous avions toujours cuisiné en binôme. Linaël nous a aidé à les frire, tandis qu'Harttu trempait les fleurs dans la pâte en fredonnant avec un machinal comique.
J'ai raconté la première cuite du Lapin Osaka : à dix-huit mois, au Chanel n°5 ; le centre anti-poison a dû appeler la maison Chanel, qui par bonheur ne met que de bonnes choses dans ses flacons.
Harttu a continué sa série de questions sur la vie quotidienne française ; après Est-ce qu'il y a beaucoup de bidets en France ?, c'était cette fois Est-ce qu'il y a beaucoup de royalistes en France ? puis Est-ce qu'il y a beaucoup d'animaux sauvages en France ?.

Whisky, pétard, un tube de mon adolescence : c'est vraiment les vacances ! (Le tube c'était Informer de Snow. Vous savez : "a niki boum boum daah !" Je suis toujours capable d'en chanter le refrain en yahourt et j'en suis très fier'.)

Bon mais, demandez-vous, quel rapport avec la chèvre ? C'est mon nom indien, Chèvre chanceuse. Je l'ai eu lors d'une cueillette de fleurs d'acacias et il me va vraiment bien.

lundi 24 mai 2010

Le problème avec les burettes - Une aventure du Lapin Osaka

Mon ami Joël, alias Le Lapin Osaka, m'a conté une amusante aventure qui lui est arrivée récemment. Je me marre, donc je narre :

burette

Après avoir utilisé un piston à haute pression, Le Lapin Osaka voulut le graisser. Pour ce faire, il existe une méthode, dite de la cuillère à café, qui implique de sacrifier une cuillère à café ordinaire pour verser un petit volume d'huile de vidange à l'intérieur dudit piston.
Mais une pénurie de ces aimables objets sévit chez lui depuis assez longtemps pour approcher maintenant le seuil critique (de une cuillère, qui imposerait une parfaite alternance entre lavage et usage, voire de zéro cuillère, mais je préfère ne pas y penser). C'est ainsi, m'expliqua-t-il, que l'idée lui vint de se procurer cet ustensile si pratique : une burette.

Une petite burette en cuivre avec un bec coudé, et sur le dessus de la poignée, un poussoir qui ferait pfhht, pfhht quand on appuie dessus serait idéale, mais tout autre modèle lui conviendrait, pourvu qu'il soit raisonnablement fonctionnel.
Le Lapin Osaka se rendit donc au garage Citroën en face de la boulangerie, de l'épicerie et de la pizzeria. Il était près de sept heures, et après avoir fait le tour de l'atelier désert, il ressortit sans avoir vu personne, et sans burette.

Avisant alors le bric-à-brac entassé à côté du garage, Le Lapin Osaka eut l'idée d'aller demander au brocanteur si, par une plausible bonne fortune, il n'aurait pas une vieille burette à lui vendre.
Non ! Lui répondit le brocanteur, un grand costaud dont les favoris ne déparaient pas son pantalon de velours et sa chemise de bûcheron. L'abrupt refus fit sursauter son chaland, notre Lapin, qui s'était laissé distraire par une vieille enseigne, un grand U provenant probablement du resto U.
Tout en contemplant une caisse où voisinaient pieds de lampes, bouillottes, timbales et pompes à vélo, Le Lapin Osaka insista : parmi tous ces objets, qui sait ? Une petite burette pourrait facilement s'être cachée et faite oublier...
Le brocanteur répliqua avec fermeté : Non, il n'y a pas de burette ici, c'est impossible !

Puis il se radoucit pour expliquer : c'est à cause des collectionneurs, vous comprenez. Il y a des collectionneurs de burettes à Besançon. Plusieurs. Ils passent souvent, pour être sûrs de ne pas s'en faire souffler une par un autre collectionneur.
L'un d'eux en a plus de deux cents, ajouta-t-il pour bien montrer au Lapin qui l'écoutait d'un air dubitatif, à quel point c'était chose sérieuse que ces collections de burettes. Ils me prennent toutes sortes de burettes. Comme la burette culbuto que j'avais encore hier ; vous savez, celles qui sont lestées pour pouvoir être jetées dans un coin sans se renverser. Des burettes de toutes les tailles. Des burettes dont la marque est gravée sur le poussoir. Des burettes en alu, en étain, en plastique, en acier, en cuivre, en laiton,...

Il aurait pu, sans doute, poursuivre encore longtemps sa litanie des burettes, décrire toutes ces burettes qu'il ne pourrait pas procurer au Lapin Osaka, dont les désirs en matière de burette étaient pourtant si modestes. Ce dernier haussa les épaules. Une petite cuillère de plus ou de moins, finalement...

mardi 18 mai 2010

Quatre jours d'une rare intensité... L'art dans le pré

Comment raconter de pareils moments ? Il faut les vivre. Je vais pourtant essayer.

Ailloncourt, c'est d'abord une porte qui s'ouvre dans la nuit sur une grande salle illuminée par des lustres féeriques, où toute une joyeuse tablée nous accueille chaleureusement. Entré avec nous, le temps bloque sa respiration, fait signe qu'il ne veut pas déranger et se retire sur la pointe des pieds : pendant quatre jours, il sera dix heures dix.

Nous ne nous sommes pas plutôt joints aux convives que Sharon fait apparaître devant nous deux assiettes bien remplies, escortées de verres dont le contenu ne cessera de monter et descendre.
Tout en prêtant l'oreille aux conversations animées, je lorgne sur le décor : partout, des toiles, des sculptures, d'étonnants objets. Mes yeux tentent une mitose pour ne pas en perdre une miette.

Le lendemain matin, j'explorerai avec la même délicieuse curiosité le fameux pré, déjà peuplé d'étranges hôtes.

La libellule...

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la coccinelle...

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et l'oiseau perché sur un vélo...

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Un coeur de pierre se dore les ventricules au soleil, près de canards en plastique barbotant au milieu des nénuphars. Plus loin, une main géante déploie ses phalanges taillées à même le tronc qu'est son poignet.

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Puis je fais connaissance avec Aglaé, la petite soeur de Georges-Alphonse :

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Plutôt mignonne, non ? Tout en sautant et en roulant des yeux, Aglaé me raconte la disette qui décima son espèce, puis son long périple à travers l'espace, jusqu'à la Terre où elle trouva enfin de quoi se nourrir : des salades. (Je veux dire qu'elle se nourrit de salades, bien sûr, et non qu'elle m'a raconté des salades.)

Les artistes s'installent et je commence à me promener parmi les stands, mon petit cahier à la main. Non sans m'arrêter de très nombreuses fois pour bavarder !

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Réunir cinquante artistes pendant quatre jours peut donner lieu à toutes sortes d'ambiances ; Richard et Sharon savent s'y prendre, et L'art dans le pré est placé sous le signe de la convivialité.
En italien comme en français ou en allemand, un sourire ravi est le plus clair des compliments, aussi personne n'est-il en peine pour remercier Mariann de son tiramisu.

Vanni et Sergio nous invitent à peindre sur des assiettes blanches, les cuisent, et chacun repart avec sa céramique : un hippocampe pour Sharon, une tête d'oiseau pour Sabrina, et pour moi qui ne sais pas dessiner, la silhouette de ma main ! En écho avec le caractère ancestral de nombre des techniques employées ici : fusion du bronze, poterie, taille de la pierre et du bois,...

Outre le texte que j'avais apporté sur la Femme aux deux têtes de Sabrina, j'ai écrit sur :

Cinq textes seulement, quand j'aurais voulu en écrire cinquante. Mais cinq textes, semble-t-il, appréciés ; Jean-Claude m'offre L'étoile de Venise, tandis qu'Alain prévoit de graver Cosmologie...
Surtout, ils me traitent, moi l'escribouillard' amateur', en égal'. Ce qui constitue le meilleur coup de pouce pour me décider, enfin, à me prendre au sérieux !

Et le soir, c'est la magie de la coulée...

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(Vous trouverez des photos de la coulée du lundi soir ici, d'autres photos et même une vidéo .)

Richard et Sharon, tout comme Salif et Karim, leurs invités Burkinabés, utilisent la technique de la coulée à cire perdue : la sculpture est d'abord réalisée en cire, puis enveloppée d'une gangue d'argile. Durant la fusion du bronze, les moules sont mis au feu et vidés de leur cire. Aussitôt que le bronze est prêt, il est versé dans les moules, à plus de 1200 degrés... C'est superbe !
Le moment où le creuset est retiré du feu, rougeoyant, pour verser délicatement le bronze dans la mince cheminée, est particulièrement impressionnant. Si un moule casse après avoir été vidé de sa cire, la sculpture est perdue ! C'est ce qui arrive à Richard le samedi. Désolant. Le corps du crocodile manqué semble s'émietter à partir des pattes avant. Sa gueule semblait pourtant si vivante...

Le lundi soir, j'enflamme mes bolas pour saluer la dernière coulée du festival...

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Jean-Luc, artiste touche-à-tout, m'accompagne à la guitare...

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pendant qu'Éric prend des photos de mon mini-spectacle.

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Le plus difficile est de dire au revoir à tout le monde. Heureusement, la prochaine édition du festival aura lieu en septembre !

jeudi 6 mai 2010

L'art dans le pré

Je m'en vais tremper ma plume dans la térébenthine à l'occasion de L'art dans le pré. Venez faire un tour à Ailloncourt ce weekend ! Vous pourrez y voir les dernières toiles de mon amie Sabrina, découvrir une cinquantaine de peintres, sculpteurs, photographes,... et peut-être assister à ce moment magique, une coulée de bronze par Richard et Sharon Baker.

vendredi 19 mars 2010

Modèle

J'ai commencé à poser à dix-huit ans, quand je suis arrivé' à la fac. D'abord pour mon amie Sabrina chez laquelle je passais le plus clair de mon temps, puis dans un petit club de dessin aux environs de Besançon. Les gens du club venaient à tour de rôle nous chercher, le prof et moi. Nous soupions chez eux. Ensuite je posais deux heures, dans un local bien chauffé, pas comme aux beaux-arts où les étudiants peignent parfois en moufles. Je choisissais toujours la pose moi-même, ce qui m'apprit à me représenter ce que je donnais à dessiner, pour éviter aux élèves les entrecroisements compliqués et les raccourcis trop brutaux.

Les membres du club, de vieilles dames pour la plupart, n'étaient pas très douées. Je trouvais amusant de passer de l'autre côté des chevalets pour y trouver mon image plus déformée que dans un miroir concave. Parfois c'était l'une d'elle qui se penchait sur l'ouvrage de sa voisine et piquait ma curiosité en commentant : "Mais non, elle n'a pas un sein plus gros que l'autre !" ou "Tiens ! On dirait un cochon. - Et la tienne alors, une souris !" De lumineux souvenirs. Par la suite, j'ai encore posé à l'occasion pour les gens que j'aime, mais de moins en moins souvent, puis plus du tout.

Sabrina a continué à peindre. Elle expose, se rapprochant d'une activité de peintre professionnelle pour laquelle, si le talent ne lui a jamais fait défaut, l'aplomb lui manque encore. Elle y consacre de nouveau beaucoup de temps, me dessinant comme alors, et je retrouve avec plaisir mes habitudes de modèle. Disposer mes membres avec naturel, trouver les appuis qui tiendront longtemps, vérifier l'inclinaison de ma tête d'après les limites de mon champ de vision, me bagarrer un peu avec les muscles de mon visage.

Puis me laisser gagner par cet engourdissement attentif, cet état hypnotique où mes pensées vagabondent sans s'éloigner de mon corps. Guetter les mouvements de mon amie, ses yeux d'oiseau en alerte qui semblent prendre devant eux ce que la main pose sur le papier ou la toile. Sortir en sursaut d'une rêverie : "Ai-je bougé ?" vérifier, retrouver le calme, laisser revenir doucement chaque muscle en place. Écouter le crayon tracer et préciser les traits, observer le pinceau mélanger des couleurs, pris d'une vie propre, insecte affairé tendu vers un but qui m'échappe. Dénouer enfin mes membres amollis, en refaire usage mobile, aller voir.

Sur le chevalet, une image qui n'existait pas l'heure d'avant. Sortie d'où ? Mon double me sourit, ou jette devant lui un regard languide. Il a toujours l'air d'en savoir plus long que moi. Son apparition, du moins, ne semble pas le troubler le moins du monde. Son existence m'ôte toute pudeur : ce que je donne à voir de moi, c'est ce dessin, avant même qu'il existe. Que ma nudité de modèle coïncide en pratique avec ma nudité comme élément d'une sexualité ne porte pas de sens.

Quand je pose, chaque centimètre carré de peau, chaque muscle a la même importance, sans qu'il soit pertinent de les hiérarchiser ou de focaliser sur un organe à la symbolique plus forte. A envisager mon corps de cette manière, sa beauté m'apparaît plus clairement que jamais -je ne parle pas de vérifier tel ou tel critère comme dans un concours canin, mais de la beauté que possède le corps humain d'être une merveilleuse machine.

Ce qui ne m'empêchera pas, une fois spectateur', de tomber comme Narcisse amoureux d'un regard perdu ou du creux d'une épaule. Car entre cet ensemble harmonieux et le charme que je trouverai à l'un ou l'autre détail, sans forcément voir comment le premier soutient toujours le second, il y a tout l'art du peintre pour donner du sens à ce qui aura cessé d'être un corps : une image.

mercredi 3 mars 2010

La claque

Mes nuits sans sommeil me sont tombées dessus d'un seul coup, je suis claqué'. Alors je reste pelotonné' dans mon fauteuil, à boire du ricoré en écoutant Mylène Farmer. Oui j'ai mauvais goût, je le cultive même, juste pour les moments comme celui-là.

mardi 2 mars 2010

Retour des choses

Un rencard de paperasse est l'une des plus abominables corvées qui se puissent : expliquer à la dame pourquoi la situation n'est pas meilleure, pourquoi on n'a pas fait ce qu'il fallait, pourquoi on n'a pas plus de sous que ça. Ce genre de connerie implique généralement un humiliant déballage de sa vie privée. Mais pour ce rendez-vous qui m'énervait d'avance, j'avais un plan : faire mon numéro de pauvre victime qui s'en sort pas. Victime, c'est la pure vérité. Qui s'en sort pas, vu de l'autre côté du bureau ce n'est sans doute pas faux, mais de mon point de vue je m'en tire plutôt pas mal.

J'ai eu envie de lui faire l'impression la plus désagréable possible, tout en ne lui donnant bien sûr aucune raison objective de me sacquer. Pour qu'elle n'ait pas, mais alors pas du tout, envie de rouvrir mon dossier, pour qu'elle s'empresse de boucler ça de façon à être sûre de ne pas me revoir, c'est-à-dire de prendre la décision qui m'arrangeait. Bien sûr, c'est mal : c'est de la manipulation émotionnelle, une crasse, un moyen de salaud. Mais est-ce que moi, j'ai choisi un boulot où les gens sont forcés d'en passer par où je veux, de se mettre en slip de trois jours devant une inconnue ? Je ne ferais un boulot comme le sien pour rien au monde.

Je suis allé' à ce rencard en me remplissant la tête des phrases les plus misérabilistes que je pouvais trouver. J'ai raconté à la bonne dame, qui n'en demandait pas tant, la situation dans laquelle m'avait mise mon boulot à Siloë. Pas besoin de forcer le trait pour brosser un tableau lamentable, mais je ne me suis pas gêné' pour entrer dans les détails et même pleurer un peu. En sortant, il faisait beau. J'avais réussi mon coup au-delà de toute espérance et je me sentais léger'. Pour une fois, ces souvenirs m'ont fait venir des larmes, non malgré moi, mais exprès. Non amères, mais jouées. Et bon sang, ce que ça fait du bien !

lundi 1 février 2010

Un café ? Non, juste un grain.

Au début c'était vraiment pour rigoler. Je pointais un index sévère sur la machine à café, lui intimant de ne pas remplir mon gobelet à ras bord. Petit à petit c'est devenu... machinal, comme on se met à toucher du bois ou à parler au passé décomposé (je suis viendu', j'ai prendu). Maintenant, je dois me rendre à l'évidence : je parle à la machine à café. C'est pas sérieux. :-)

mardi 29 décembre 2009

De retour

D'abord, vous me manquiez trop. Ensuite, je suis toujours accro à internet, tant pis tant mieux. Enfin, après des semaines de recherches et de lamentations, j'ai remis la main sur ce pignouf de login et ce sarko de mot de passe. Donc voilà, me revoilà. Je suis content', et j'ai plein de choses à vous dire.

mardi 24 novembre 2009

Recette : la sauce j'en-veux-pas

Qu'est-ce qui n'allait pas, au juste, avec cette sauce ? D'après Mathieu, tomate-oignon-citron ça faisait trop d'acidité. Pour moi, soit le citron était gâté, soit il s'est fâché avec le cacao. Quoi qu'il en soit, c'était raté, et bien raté ; l'odeur m'a dissuadé' d'y goûter, même si Mathieu m'a assuré que c'était mangeable "en petite quantité".

dimanche 25 octobre 2009

Les vacances de la machine à café (avec Hegel sur une table de dissection)

J'espère que la machine à café ne m'aura pas complètement oublié' à la rentrée. Depuis le temps que je l'apprivoise, un début de communication semble s'être mis en place : l'autre jour, je lui ai dit "Tu me le remplis pas trop, hein !" et elle ne me l'a pas trop rempli. D'un autre côté, je suis devenu' très fort' au slalom en chrono négatif avec handicap (en langage courant : traverser la fac, en retard, sans renverser mon gobelet rempli à ras bord).

samedi 17 octobre 2009

Je me suis coupée en me rasant

Cette phrase est tellement plus intéressante au féminin...

En réalité, mon deuxième rasage tout' seul' s'est beaucoup mieux passé que le premier. J'ai même découvert que diriger ma main vue dans un miroir était certes coton, mais pas impossible, ce qui est rassurant pour l'avenir de ma crinière. Elle est vraiment chouette maintenant qu'elle a un peu poussé, et ça m'aurait embêté de l'amenuiser par mégarde à chaque rasage.
Crinière

vendredi 16 octobre 2009

L'usage du café

C'est pas pour me plaindre, mais j'ai une vie sociale en plus de mes journées de onze heures. Mardi soir, jeu de rôle ; mercredi soir, Lecturium ; ce soir, murder-party à la fac de Lettres - très sympa : Sophie nous avait concocté un bon scénario et il y a eu quelques rôles-play de toute beauté.

Pour l'interro de demain, ça ira : j'ai révisé dans le bus et aux pauses-déjeuner. Il faut juste que je ne m'endorme pas sur ma copie.

dimanche 11 octobre 2009

Paresse

C'est minable comme prétexte pour ne pas travailler, mais Neal Morse m'énerve vraiment. Je l'imagine incliner la tête avec un sourire rêveur et la relever d'un coup pour planter son regard dans celui d'une jeune spectatrice, tellement il est mièvre dans One. Sûr, j'aurais pu changer de musique et m'y mettre. C'est d'ailleurs ce que je vais faire, il n'est que dix heures. J'estime ne pas avoir perdu mon temps, vu que mes flâneries m'ont fait découvrir Tina Fiveash et ses photos à se pisser dessus. Et maintenant assez zoné, à nous deux les équadiffs !

(peu après)

Malgré mon déplorable anglais, j'ai écrit à Tina Fiveash pour lui dire tout le bien que je pense de son travail... elle m'a répondu tout de suite, très gentiment, elle va même m'envoyer une carte postale d'un des "Hey hetero !". Voilà, c'est tout, ça me fait plaisir.

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