L'enragé'

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Tag - brocante

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jeudi 15 mars 2012

Cornet de glace

Il m'est arrivé une chose extraordinaire : j'ai mangé une glace dans la rue. Oui ! J'ai mangé une glace dans la rue ! Comme quoi les événements les plus merveilleux peuvent se produire à l'improviste. Sortir et m'amuser le jour de la fête de la musique, ou même manger des glaces en me fichant éperdument que ça m'ait valu un jour de découvrir ce que toute une ville pensait de moi.

Je le clame : oui, j'ai été violée et je m'en suis parfaitement remise. Oui, j'ai été jugée pour ces viols, j'ai été cataloguée comme « salope » et les gens ont essayé de m'étouffer sous l'opprobre. Ça m'a pris plus de temps -quinze ans, une paille- mais finalement je m'en suis remise aussi. Alors youpiii !

Et maintenant que j'ai mangé une glace dans la rue en pleurant, en hurlant de joie, maintenant que je sais que je pourrai manger autant de glaces que je voudrai et qu'elles seront bonnes, sans blague ! qu'elles n'auront plus jamais ce goût de plâtre, eh bien je me sens invulnérable, comme Superman : qui pourrait bien arriver à me faire vraiment du mal ?

En plus, je suis à Berlin. Outre qu'il s'y produit tellement de soirées queer que je ne sais plus où donner de la tête, les trottoirs de la ville sont une brocante permanente et gratuite. En quelques jours, j'ai trouvé dans la rue une chouette veste pour remplacer l'ancienne qui était foutue, et deux matelas : un pour chez moi et un que j'ai échangé contre un téléphone. Comme si les objets poussaient entre les pavés dès que j'en ai besoin.

Simultanément et sans doute sous l'influence magique que je sens ici, j'ai accumulé les succès les plus improbables, de « me faire relâcher spontanément par des contrôleurs securitas » (réputés les plus intraitables) à « avoir fini d'écrire un livre » en passant par tout plein d'audaces sexuelles que je ne détaillerai pas ici. Bref, la vie me sourit à la mesure de la confiance que je lui accorde.

Pour le coup, je commence à toucher du doigt une sorte de paix, à me débarrasser de ce « ça pourrait toujours être mieux » qui me hante et m'empêche de profiter de l'instant. Ma vie ne serait-elle pas exactement ce que je pourrais rêver de mieux ? Il me semble que si. Ne serais-je pas exactement la personne qu'il faut pour vivre cette vie ? Eh, whaouh ! Il me semble vraiment que si ! T'as raison, Amanda. T'as mille fois raison.

lundi 24 mai 2010

Le problème avec les burettes - Une aventure du Lapin Osaka

Mon ami Joël, alias Le Lapin Osaka, m'a conté une amusante aventure qui lui est arrivée récemment. Je me marre, donc je narre :

burette

Après avoir utilisé un piston à haute pression, Le Lapin Osaka voulut le graisser. Pour ce faire, il existe une méthode, dite de la cuillère à café, qui implique de sacrifier une cuillère à café ordinaire pour verser un petit volume d'huile de vidange à l'intérieur dudit piston.
Mais une pénurie de ces aimables objets sévit chez lui depuis assez longtemps pour approcher maintenant le seuil critique (de une cuillère, qui imposerait une parfaite alternance entre lavage et usage, voire de zéro cuillère, mais je préfère ne pas y penser). C'est ainsi, m'expliqua-t-il, que l'idée lui vint de se procurer cet ustensile si pratique : une burette.

Une petite burette en cuivre avec un bec coudé, et sur le dessus de la poignée, un poussoir qui ferait pfhht, pfhht quand on appuie dessus serait idéale, mais tout autre modèle lui conviendrait, pourvu qu'il soit raisonnablement fonctionnel.
Le Lapin Osaka se rendit donc au garage Citroën en face de la boulangerie, de l'épicerie et de la pizzeria. Il était près de sept heures, et après avoir fait le tour de l'atelier désert, il ressortit sans avoir vu personne, et sans burette.

Avisant alors le bric-à-brac entassé à côté du garage, Le Lapin Osaka eut l'idée d'aller demander au brocanteur si, par une plausible bonne fortune, il n'aurait pas une vieille burette à lui vendre.
Non ! Lui répondit le brocanteur, un grand costaud dont les favoris ne déparaient pas son pantalon de velours et sa chemise de bûcheron. L'abrupt refus fit sursauter son chaland, notre Lapin, qui s'était laissé distraire par une vieille enseigne, un grand U provenant probablement du resto U.
Tout en contemplant une caisse où voisinaient pieds de lampes, bouillottes, timbales et pompes à vélo, Le Lapin Osaka insista : parmi tous ces objets, qui sait ? Une petite burette pourrait facilement s'être cachée et faite oublier...
Le brocanteur répliqua avec fermeté : Non, il n'y a pas de burette ici, c'est impossible !

Puis il se radoucit pour expliquer : c'est à cause des collectionneurs, vous comprenez. Il y a des collectionneurs de burettes à Besançon. Plusieurs. Ils passent souvent, pour être sûrs de ne pas s'en faire souffler une par un autre collectionneur.
L'un d'eux en a plus de deux cents, ajouta-t-il pour bien montrer au Lapin qui l'écoutait d'un air dubitatif, à quel point c'était chose sérieuse que ces collections de burettes. Ils me prennent toutes sortes de burettes. Comme la burette culbuto que j'avais encore hier ; vous savez, celles qui sont lestées pour pouvoir être jetées dans un coin sans se renverser. Des burettes de toutes les tailles. Des burettes dont la marque est gravée sur le poussoir. Des burettes en alu, en étain, en plastique, en acier, en cuivre, en laiton,...

Il aurait pu, sans doute, poursuivre encore longtemps sa litanie des burettes, décrire toutes ces burettes qu'il ne pourrait pas procurer au Lapin Osaka, dont les désirs en matière de burette étaient pourtant si modestes. Ce dernier haussa les épaules. Une petite cuillère de plus ou de moins, finalement...