L'enragé'

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Tag - Marie-France Hirigoyen

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mercredi 18 janvier 2012

La violence conjugale, on peut en parler le 8 mars et le 25 novembre, mais aussi les autres jours

Je ne veux plus avoir à dire aux femmes qui sont dans des relations malsaines, enfermantes et abusives, que la réalité dans laquelle on les force à vivre n'est que la projection de l'imaginaire d'un type qui veut les statufier à une place d' "épouse idéale", quitte à les nier, les violenter psychiquement voire physiquement.

Je ne veux plus avoir à regarder des femmes se débattre avec "Je sais que c'est vrai, mais si je lui dis, il va juste me répondre telle chose illogique et dégueulasse et le débat sera clos." Je ne veux plus avoir à faire comme si elles avaient la moindre petite chance d'obtenir un vrai dialogue avec leurs connards de mecs et d'obtenir une relation saine avec eux.

Je ne veux plus avoir à dire à quelqu'une que si quelqu'un l'empêche de respirer, elle n'a pas à se soucier de le décevoir dans son immense amour. Je ne veux plus avoir à lui répéter trente fois en deux heures qu'être respectée en tant que personne passe avant les exigences délirantes de son mec, et à sentir qu'elle n'est toujours pas sûre de vouloir mettre ça en tête de ses priorités.

Je ne veux plus entendre parler de légitimité biologique à la violence masculine et à la docilité féminine. Je ne veux plus avoir à emmener personne aux urgences à cause du sexisme.

Et ça ne commence pas à vingt ans. Les femmes sont programmées dès l'enfance pour tomber dans le panneau. Et ça ne commence pas non plus avant la naissance. Il n'y a pas de gène de la femme battue. Et ça ne concerne pas un certain type de personnalité. Tout le monde peut se faire avoir, même des hommes d'ailleurs. Le seul facteur vraiment significatif dans la violence conjugale, c'est cette éducation genrée de merde.

Quand vous voyez un gosse, écoutez-vous penser à lui. Essayez d'imaginer ce que vous penseriez si c'était une fille au lieu d'un garçon, un garçon au lieu d'une fille. On baigne tellement dans le double standard que la plupart du temps on ne voit même pas qu'on fait une différence. Faisons une parenthèse pour parler du double standard.

A l'école, vous vous souvenez ? Les filles et les garçons étaient traités pareil, exactement pareil. Pourtant, quand on mesure le temps d'attention, le temps de parole auxquels chaque élève a droit, les garçons en obtiennent deux fois plus que les filles. Ce n'est pas qu'à l'école. Choisissez une anecdote à propos d'un gosse et écrivez-la avec un prénom féminin et avec un prénom masculin. Faites circuler les deux versions autour de vous. Lequel a raison de s'exprimer, de gagner en autonomie ? Laquelle devrait penser à tout le mal que se donnent ses parents et être plus sage ?

Voilà pour le double standard. Pour que ça commence le plus tôt possible, on prend soin d'expliciter visuellement le genre attribué à l'enfant. Les T-shirts Hello Kitty et autres babioles roses à paillettes dont on pare les petites filles me font gerber. Je les vois comme des pancartes annonçant : vous pouvez traiter cette personne comme quantité négligeable, la réprimer si elle s'exprime ou s'autonomise et lui apprendre à faire passer le désir d'autrui avant ce qu'elle veut vivre.

Bon, je suis super en colère alors je vous raconterai une autre fois comment on fabrique une cage pour femme battue, comment on la fait entrer dedans, et surtout pourquoi elle ne sort pas si on ouvre la porte. C'est un truc qui donne vraiment l'impression que les femmes battues sont stupides et ne veulent pas être aidées. Si vous êtes impatient's de savoir la suite, ou si vous en éprouvez le besoin pour une quelconque raison, je vous recommande la lecture de Femmes sous emprise, de Marie-France Hirigoyen.

dimanche 21 novembre 2010

Empêchement

Voici un mois que je n'ai rien écrit. Depuis que quelqu'un qui se prétendait mon ami m'a agressé' pour la deuxième fois et m'a terrorisé'. Je lutte pour sortir de ce silence, de cette confusion qui plonge mes mots dans un brouillard mortifère. Comme je ne veux parler de rien d'autre, et que je ne veux pas décrire ici, de la manière qui s'imposerait à moi, ce que j'ai vécu, je vais vous parler des livres de Marie-France Hirigoyen.

En manière d'introduction, je vous recopie ce que, m'interrogeant sur le titre que j'ai choisi pour ce billet, j'ai trouvé dans le Robert historique de la langue française.

EMPÊCHER v.tr. est issu (v. 1120, empeschier), comme sa variante ampagier (XIIIe s.) du bas latin impedicare prendre au piège, entraver, dérivé de pedica piège pour prendre les animaux par la patte, lui-même dérivé de pes, pedis (pied).
Le verbe a d'abord eu le sens repris du latin de mettre (qqn) dans l'impossibilité d'agir, entraver et s'empêcher (v. 1160-1174) s'empêtrer, s'entraver, acception qu'il conserve jusqu'au XVIIe siècle. Il signifie parallèlement mettre obstacle à ce qu'une chose ait lieu (1297), toujours en usage, alors que l'expression empêcher le chemin barrer la route (XIVe s.) a disparu. Au XIIIe s. apparaît l'emploi aujourd'hui courant du verbe suivi d'un infinitif : empêcher (qqn) de (faire qqch.) puis, au début du XVIe s., empêcher que (1534), ordinairement suivi de ne et du subjonctif. De là les locutions il n'empêche que, n'empêche que et familièrement n'empêche.
Empêcher qqn a signifié le gêner moralement (1415) et l'occuper (1538). La forme pronominale s'empêcher réapparaît à la fin du XVIe s. (1580, s'empêcher de) avec le sens de s'abstenir, se dispenser de, qui a fait place à celui de se retenir de. EMPÊCHÉ, ÉE adj. a eu des emplois variés, liés à l'idée d'entrave. L'adjectif a signifié accablé (1283), encore au XVIIe s., et être empêché de embarrassé (XIVe s.) s'est maintenu jusqu'au XIXe siècle. ...

Marie-France Hirigoyen a écrit Le Harcèlement Moral : la violence perverse au quotidien, un livre indispensable, un précieux secours qu'elle a décliné en Malaise dans le travail, harcèlement moral : déméler le vrai du faux et Femmes sous emprise, les ressorts de la violence dans le couple.
Vous en lisez un, dans lequel ce qui vous semblait spécifique à votre cas, ce que vous aviez admis comme découlant d'une situation particulière, de la personnalité de votre tourmenteur' ou encore ce que vous aviez, hélas, attribué à vos propres défauts et insuffisances, est minutieusement décrit par quelqu'un qui ne vous a jamais vu'.
Vous comprenez enfin qu'il ne vous a jamais appartenu de mettre fin à cette situation par un comportement plus conciliant, mais que le plus souvent, seule la fuite pouvait vous délivrer.
Vous réalisez aussi que vous n'êtes pas resté' à subir ça par stupidité mais que cette issue vous avait été barrée par la mise en place d'une emprise psychique, véritable lavage de cerveau dont les techniques dignes d'une secte sont maîtrisées avec une effrayante subtilité par nombre de personnes aux dehors anodins.
Et là, vous êtes en colère.

Mais pour salutaire qu'elle soit, cette colère ne suffit pas à vous sortir du puits dans lequel on vous a jeté'. Une fois tiré' des griffes du sinistre individu, la peur persiste. Impressionné' par ce qu'il a été capable de vous faire accepter, vous continuez à lui prêter des pouvoirs surnaturels et à le redouter au-delà de toute raison. De ça aussi, on guérit, quoiqu'avec une douloureuse lenteur.
Ce n'est pas encore fini.

Une fois dressé' à être une bonne victime, vous devenez une proie de choix pour tous les pervers narcissiques dont vous croiserez la route. C'est là qu'intervient ma récente mésaventure. Or les techniques mises en oeuvre dans l'emprise psychique, outre qu'elles vous paralysent de terreur, sont destinées à vous empêcher de penser et de vous exprimer. D'où ce silence.